Lors de notre passage dans la baie de San Francisco, nous avons rencontré des architectes californiens qui travaillent depuis des années le matériau paille. Inspirés par la pérennité de certaines constructions en paille érigées aux Etats-Unis par les exploitants agricoles des plaines dès les années 1900, encore conservées aujourd’hui, ils mettent à l’honneur ce matériau dans leur design. Qu’elle soit intégrée à des lignes contemporaines ou utilisée pour des abris plus sommaires dans des situations d’urgence, la paille offre des nombreuses possibilités. Les techniques de mise en œuvre varient selon les concepteurs et les projets.
Bale long house – Bob THEIS
L’architecte Bob THEIS, nous présente son travail de recherche sur la mise en œuvre d’abris, utilisant les ballots de pailles comme des blocs travaillant en compression. Il a imaginé une structure primaire en ossature bois lamellé-collé, permettant d’y empiler les ballots de paille pour former une voûte. Dans cette solution, la paille joue à la fois un rôle de stabilisation et d’isolation. L’étanchéité est assurée par un textile étanche, lesté par des petits sacs de sable, avant d’être recouvert d’un bardage.
Mode de construction :
- Définir la ligne médiane du bâtiment avec une ficelle tendue ancrée dans le sol.
- Hisser les fermes de bois en lamellé-collé, en alignant le faîtage à la ligne médiane avec un fil à plomb. Ancrer au sol en pied avec un système de fixation boulonnée.
- Créer une base de sacs de graviers au sol en formant un un léger angle, destiné à recevoir le mur de ballots incliné.
- Empiler les ballots les uns sur les autres en passant les traverses dans les liens des ballots pour les fixer à la structure. Positionner deux cales de bois sous chaque ballot, permettant de maintenir l’angle du ballot de manière à ce qu’il reste toujours perpendiculaire aux traverses.
- Au niveau de l’arrête faîtière, positionner les ballots dans le sens vertical, en les faisant se chevaucher de chaque côté en quinconce. Cet appareillage au niveau de la clé de voûte permet de laisser un vide entre les ballots, pour laisser entrer la lumière et/ou créer une ventilation naturelle. Ils peuvent être comblés par des « demi-ballots ».
- Fixer ensuite des sangles à travers les ballots, aux pannes à l’arrière.
- Dérouler des rouleaux de Tyvek (Textile non tissé de fibres de polyéthylène haute densité, non toxique et recyclable) sur les murs de paille. Agrafer au sommet, et enterrer le surplus dans le sol au pied du mur.
- Fixer le Tyvek avec des cordes positionnées au niveau des entraxes des sangles, lestées avec des sacs de sable.
- A l’intérieur, les ballots peuvent être recouverts directement d’un enduit à base d’argile.
- Pour d’avantage de pérennité, placer des pannes horizontales et couvrir avec un matériau de protection, type tôle ondulée.
FERAL BALE – Bob THEIS
Au cours de ses recherches sur les constructions en paille, Bob Theis a également imaginé un abri low-cost et recyclable, utilisant les ballots de paille à la manière de blocs structurels. Cette technique de mise en œuvre ne fonctionne que dans le cas d’abri à un seul niveau, les propriétés structurelles de la paille empilée sans structure primaire ne permettant pas de grandes libertés.
Pour cet abri, Bob Theis a donc imaginé simplement monter les murs de pailles avec un appareillage à la façon de blocs de maçonnerie. Après avoir ancré la première ligne de ballots au sol par des fixations métalliques, chaque ballot est fixé par des liens à celui d’à côté, ainsi qu’à celui du dessus et du dessous. Au niveau de la porte, les ballots sont fixés et reliés en pied par une planche de contreplaqué. Les linteaux pour les ouvertures sont assurés par un élément continu fixé en tête des murs, comme une couvertine en plastique, renforcée par un montant de bois, fixés aux ballots. Les menuiseries sont des éléments préfabriqués, que l’on peut aisément intégrer aux ouvertures, sur la face extérieure du mur de paille.
La toiture est constituée d’un système de fermes en bois doubles, isolées en sacs remplis de paille, d’une couverture légère et d’un plafond suspendu continu en intérieur.
Habitations et bâtiments publics contemporains par Arkin-Tilt Architectes
David Arkin, nous explique que la conception de bâtiments avec la paille fait partie intégrante de leur pratique. Que ce soit pour des résidences ou des édifices publics, ils ont mis au point une technique constructive qui leur est propre. Comme souvent dans la construction paille, il s’agit de considérer un système structurel indépendant, qui permet de monter aisément jusqu’à deux étages, auquel la paille vient s’associer pour servir de remplissage et d’isolation. On pourrait donc imaginer une structure légère (bois ou métal) totalement indépendante de la paroi en paille.
La technique que nous détaille David Arkin consiste comme la plupart des techniques constructives en paille, à intégrer les ballots à la structure bois (comme on le retrouve dans la technique du GREB). La particularité de cette technique est qu’elle détourne un élément de structure bois industrialisé, initialement prévu pour servir de poutre, pour l’utiliser en montant, en position verticale. Sa dimension, supérieure à celle d’un montant bois standard, permet alors d’y intégrer les ballots de paille, sans avoir à concevoir une double structure. Le montage est ainsi extrêmement simple et deux étages sont facilement envisageables. Avec cet assemblage, on pourrait considérer la paille comme simple isolant, mais selon Anthony Dante, ingénieur structure en collaboration avec le cabinet Arkin-Tilt, la paille ainsi empilée constitue un matériau lourd et capable d’absorber les vibrations. Elle joue donc ici aussi un rôle structurel secondaire dans la stabilisation de la structure.
David Arkin nous présente certains de leurs projets ainsi réalisés, mettant en avant les qualités esthétiques de ce matériau dans une architecture actuelle et sobre.
C.
jacques bouyer
Chapeau (de paille, elle était facile) j’aime beaucoup les vitrages intérieur ou l’on aperçoit le matériau .Mais quel en serait le coût en France!