Après la région de Oaxaca, notre route continue à travers la région du Chiapas. Nous sommes à présent sur le territoire du sous-commandant Marcos, bastion de la lutte Zapatiste qui revendiquait dans les années 90-2000 un meilleur partage des richesses et la fin d’un système quasi féodal entre le peuple et quelques riches propriétaires terriens. Depuis le mouvement s’est essoufflé mais il en reste des communautés autonomes et des « ejidos », propriétés agricoles collectives. Nous roulons dans un paysage montagneux. La route prend de l’altitude et le climat devient plus frais.
San Cristobal de las Casas
Chemin faisant, nous effectuons un bref passage par le village de Chiapa de Corzo. La fête annuelle qui y bat son plein est classée au patrimoine mondial de l’UNESCO pour ses défilés de « parachicos » (hommes en costumes traditionnels singulier) et son combat naval nocturne. Nous arrivons en plein temps mort des festivités, entre deux jours de célébrations intenses et découvrons une ville qui émerge doucement de sa gueule de bois. L’animation semble reprendre peu à peu, entre la messe bondée dans l’église centrale, et le marché dans les ruelles, jonchées de débris de fêtes aux effluves de Margarita et de Micheladas.
Nous décidons de continuer notre chemin pour atteindre San Cristobal de las Casas en fin de journée ou nous établissons notre campement à quelques centaines de mètres du centre-ville. Cette petite ville de montagne est une étape bien touristique. Les visiteurs américains, européens mais aussi mexicains sont nombreux. Le samedi n’arrangeant pas les choses, nous déambulons au milieu d’une joyeuse foule, dans les jolies ruelles du cœur de ville ou s’enchaînent boutiques de souvenirs, bars et restaurants. Ici, la richesse générée par le tourisme contraste avec la situation de certaines communautés indiennes qui tentent de vendre quelques tissus à la sauvette. De nombreux enfants déambulent dans les rues, les bras chargés de babioles à vendre. Les petits cireurs de chaussures trimbalent leur boite de banc en banc et entrent proposer leur services dans les bars et les restaurants.
Les villages du Chiapas rural
Le long de la route de montagne qui serpente jusqu’à Palenque, nous traversons de nombreux villages. Des habitations s’égrainent dans la montagne et leurs accès sont bien souvent de simples sentiers de terre qui s’enfoncent dans la végétation depuis le bord de la route. Les maisons en torchis sont nombreuses. La terre crue reste un matériau encore largement utilisé par les populations rurales. Le dimanche matin, nous croisons des dizaines de familles, en marche le long de la route, vêtues de leurs habits traditionnels pour se rendre à la messe dans les petites églises de chaque village. Les femmes ont tressé leurs longs cheveux noirs, reliés par des rubans de soie bleu clair. Toutes ont les épaules recouvertes d’un châle blanc brodé de grosses fleurs colorées dans le dos, qui tombent sur leur jupe droite ceinturée à la taille.
Contrairement aux nombreux avis et mises en gardes sur cette longue route à travers les zones reculées du Chiapas, région la plus pauvre du Mexique, nous ne rencontrons aucun barrage routier clandestin ni manifestation de force. A l’exception d’un nombre infini de « tope » (ralentisseur routier de type dos d’âne, plus hauts que larges, qui à chaque passage réduisent l’espérance de vie de nos amortisseurs), nous ne rencontrons aucune difficulté et atteignons la ville de Palenque à l’issue d’une bonne journée de route. C’est dans un camping plus que sommaire (ou nous ne nous aventurerons pas dans les douches), que nous passons la nuit au son des singes hurleurs.
Palenque
Levés à la première heure, nous débarquons sur le site des ruines Mayas de Palenque pour l’ouverture. Slalomant entre les guides, les vendeurs de bijoux, de boissons et les laveurs de voitures essayant tous de nous vendre leurs services, nous atteignons la caisse pour obtenir notre ticket d’entrée. Après une longue hésitation et une négociation médiocre, nous décidons de nous offrir les services d’un guide, pour la première (et la dernière) fois du voyage, dans l’espoir d’en apprendre un peu plus sur la civilisation Maya, leur architecture et le fonctionnement de leurs cités. Arturo, mexicain sympathique, arborant un magnifique badge de guide officiel plastifié autour du coup (aussi officiel que nos copies de passeports laminées réalisées à l’imprimerie du coin), nous accompagne pour un tour du site. Après quelques anecdotes sur les Mayas dans un français approximatif (dont certaines se sont carrément avérées fausses) et un petit cours d’espagnol avec des expressions locales, notre guide nous raccompagne à la sortie.
Nous refaisons une ballade par nous-même sur l’ensemble du site, à l’heure de la pause déjeuner des groupes. Une fois de plus, nous profitons du site presque vide, et apprécions pleinement la beauté de l’endroit. Malgré l’entretien quotidien que nécessitent ces ruines dans cet environnement tropical, la végétation gagne certains ensembles du site, et des lianes et de grands arbres se dressent sur les marches et au cœur de certains vestiges un peu plus excentrés. Sur la partie centrale la mieux entretenue, les silhouettes des temples de cette cité perdue se dressent majestueusement au cœur de la jungle, que l’on voit s’étendre à perte de vue depuis le sommet de certains d’entre eux.
C.